Tous les mouvements de notre sensibilité, si agréables qu'ils soient, sont toujours des interruptions d'un état dont j'ignore en quoi il consiste, mais qui est la vie la plus intime de cette sensibilité. Ce ne sont pas seulement les soucis les plus graves qui nous distraient de nous-mêmes : les petites contrariétés viennent aussi troubler une quiétude à laquelle nous aspirons tous sans le savoir.
Nous vivons presque toujours à l'extérieur de nous, et la vie elle-même est une dispersion perpétuelle. Et pourtant nous tendons vers nous-mêmes comme vers un centre autour duquel nous décrivons, telles les planètes, des ellipses absurdes et lointaines.
Pessoa. Le livre de l'intranquillité. Christian Bourgeois éditeur.