Je suis assis sous un arbre, au bord d'une route, tandis qu'un ruisseau coule à quelques pas, que les
insectes affairés circulent dans les herbes, et que là-haut, dans le ciel, le soleil éclaire toute la scène de ses rayons.
Toutes les impressions que je ressens en ce moment viennent de la nature physique, du monde des formes manifestées.
Mais j'ai appris que ces formes n'étaient que le vêtement que revêt chaque parcelle de la forme conservatrice de l'univers, et je sais que dans le caillou qui est là devant moi, comme dans l'arbre sous lequel je suis et dans les herbes qui m'entourent, comme aussi dans les insectes et les oiseaux que je vois, une même force circule qui entretient partout la vie sous l'impulsion du principe conservateur de l'univers, de la nature.
Cette force qui circule en moi et qui préside aussi à l'élaboration de la sève dans cet arbre, c'est la vie ; la vie, source des illusions d'ici-bas dont le ressort secret est l'amour et qui unit tous les êtres créés par la chaîne subtile des correspondances.
Alors que tous les êtres terrestres semblent étrangers les uns aux autres par leurs formes, celui qui possède la science des correspondances, c'est à dire la science de l'amour, saura toujours trouver le lien vital qui unit en un seul la création tout entière...
Et c'est alors que je pourrai comprendre comment la diffusion de la force animatrice est réglée dans l'Univers par le mouvement des astres ; c'est alors que je verrai, de la terre où je me trouve, apparaître dans le ciel le majestueux cadran zodiacal, sur lequel le soleil, la lune et les planètes de notre monde marquent, en traits de feu, l'heure de la Nature.
C'est alors seulement que j'apprendrai les modifications apportées dans la vie universelle par les différentes heures du ciel, et, à ce moment, sublimée par la prière, ma volonté mettra la parcelle vitale qui anime mon organisme en communion d'amour avec la Nature vivante, principe conservateur des formes d'ici-bas.
Je saisirai l'Unité première en action dans l'infinie diversité, et, tout vibrant d'enthousiasme, mon esprit libéré percevra, comme un songe, la réintégration future de l'étincelle divine qui le constitue dans l'éclatante majesté de l'éternelle divinité.
Saint-yves d'Alveydre (1842-1909).