Nous errons dans l'inconsistance,
mais il y a certains abandons au consistant,
certains replis du neutre sur ce qui ne l'est pas,
certaines chutes dans la densité
qui somnole dans les choses,
dans lesquelles le vertige de n'être rien nous arrache.
C'est alors que naît
la plus péremptoire des sensations
que puisse éprouver un homme :
il existe un creux qu'il faut combler.
Ainsi une vie change-t-elle parfois
pour devenir son propre envers.
Jusqu'à ce que surgisse en l'homme
une sensation encore plus irréversible :
il existe un creux qu'il faut vider.
Roberto Juarroz. Dixième poésie verticale.
Édition bilingue, traduction de François-Michel Durazzo.
Ibériques. Éditions Corti.