De mes lectures sur quelques blogs alternatifs, je ressors parfois pris de déprime.
Une sorte de mélancolie s’abat sur mon estomac comme un plat trop lourd à digérer.
Certes les nouvelles ne sont pas bonnes, et d’où qu’elles viennent, objectivement, elles ne prêtent guère à sourire.
Mais cette explication, à première vue évidente, ne me satisfait pas totalement.
Ce n’est pas leur véracité ou leur crédibilité qui est en cause, elles sont très souvent argumentées de façon convaincante.
Non, ce qui m’apparait c’est qu’elles sont toutes traitées à partir d’un point de vue unique : celui d’un être humain consommateur dans un monde marchand.
Cette perspective réductionniste est très puissante, quasiment incontestable, car elle est le reflet de la culture dominante.
De plus en plus l’homme est perçu et traité comme une entité conditionnée par la loi du marché, loi toujours plus contraignante à mesure que nous lui laissons le champ libre jusque dans notre espace privé.
Et malgré quelques tentatives de redonner une dignité humaniste aux propos, les actualités alternatives restent dans l’ensemble comme soumises (malgré elles ?) à cette volonté implacable de rendre l’être humain aussi docile et manipulable qu’un robot.
En grande partie, elles s’intègrent dans le jeu de la revendication et de la contestation, reconnu et encouragé par un système qui reçoit par là sa légitimité morale et se gratifie d'un visage acceptable.
Mais la difficulté est énorme de ne pas se laisser engloutir dans cet entonnoir, surtout lorsque l’on est soi-même confronté au poids accablant des faits, chômage, perte de revenu, précarité . . .
Aussi la résistance ne réside pas tant dans la critique ou la contradiction du système que dans la réappropriation de son âme.
Cette âme que l’on tente par toute sorte de moyen, plus ou moins élaborés et subtils, d’expurger de l’être humain afin de lui ôter tout dignité spirituelle.
L’âme est un principe qualitatif, une distinction qui élève l’homme hors du substrat de l’humus duquel il est issu.
C’est la capacité de se construire, en dehors de toutes les volontés contraires, une identité libre et lucide de tout dogmatisme.
C’est le surgissement au moment, où malgré les objections et les impossibilités matérielles de la vie, quelque chose se rebelle en affirmant un désir insensé de créer.
Hors de toute rationalité et toute récupération c’est un cri, un appel lancé au corps pour le rappeler à son devenir.
Un devenir qui ne peut se résoudre uniquement dans la satisfaction de ses désirs et la perpétuation de ses besoins.
L’âme ne va pas sans le corps, mais celui-ci veut toujours s’en affranchir.
Il ne s’agit pas d’exclure ou d’opposer, mais de replacer les velléités d’un corps-machine à leur juste place.
L’entretien et la conservation du corps ne doit pas occulter l’aspiration de l’âme à croitre dans un monde qui ne soit pas réduit à un modèle strictement économique.
Passer son temps à dépenser son énergie et son argent aux besoins exclusifs du corps c’est courir à la folie et à la ruine.
On s’en rend compte de plus en plus, d’où l’urgence de réinsuffler de l’intuition, du rêve, de l’utopie, dans nos vies.
Il y a des figures dans l’histoire qui ne manquent pas de nous inspirer.
Elles ont en commun d’aller à contre-courant de l’opinion générale en prenant un risque extravagant, celui d’être fidèle à elles-mêmes.
Ce sont ces voies auxquelles je m’associe, elles témoignent d’une âme toujours vivante portée par une indicible volonté de ne pas se laisser inféoder par les puissances, qu’elles soient de pouvoir, d’argent ou de mondanité.
Puisse cette âme résonner en mon cœur jusqu’à porter sur le réseau un peu de cette espérance.